Anyone ever read a book first in a translation of that piece of literature and then read it in its original language version ... or vice versa ?
Well, things can change a lot ... trust me.
I first read Camus' "L'Etranger" in French class as a Junior in high school ... it took us about a semester to do it justice. The next year as a Senior, we read it in our literature class in English ... things changed a lot ... and sometimes cannot ever be translated at 100% level. I wrote a paper about this for the Senior class, comparing the two versions and the problems of translation, etc. and I got a "D+" for the paper from the (crazy) literature teacher.
Angry, I gave the same paper to my French teacher of the previous year, and he said that it was very good work ...
My point = translations suck as general rule in my books ... the "beach scene" in "L'Etranger" was horribly/impossible to translate among other aspects of the book ... I live between two languages and sometimes two cultures, and that's why my PF location motto is "Lost in translation ..." but, you get used to it after awhile (17+ years and counting for me). Just my long-winded two cents ...
PS - Bill Murray is
not nearly as funny in French as he is in the original version of "Groundhog Day" ... just FYI
J
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J'ai pensé que je n'avais qu'un demi-tour à faire et ce serait fini. Mais toute une plage vibrante de soleil se pressait derrière moi. J'ai fait quelques pas vers la source. L'Arabe n'a pas bougé. Malgré tout, il était encore assez loin. Peut-être à cause des ombres sur son visage, il avait l'air de rire. J'ai attendu. La brûlure du soleil gagnait mes joues et j'ai senti des gouttes de sueur s'amasser dans mes sourcils. C'était le même soleil que le jour où j'avais enterré maman et, comme alors, le front surtout me faisait mal et toutes ses veines battaient ensemble sous la peau. À cause de cette brûlure que je ne pouvais plus supporter, j'ai fait un mouvement en avant. Je savais que c'était stupide, que je ne me débarrasserais pas du soleil en me déplaçant d'un pas. Mais j'ai fait un pas, un seul pas en avant. Et cette fois, sans se soulever, l'Arabe a tiré son couteau qu'il m'a présenté dans le soleil. La lumière a giclé sur l'acier et c'était comme une longue lame étincelante qui m'atteignait au front. Au même instant, la sueur amassée dans mes sourcils a coulé d'un coup sur les paupières et les a recouvertes d'un voile tiède et épais. Mes yeux étaient aveuglés derrière ce rideau de larmes et de sel. Je ne sentais plus que les cymbales du soleil sur mon front et, indistinctement, le glaive éclatant jailli du couteau toujours en face de moi. Cette épée brûlante rongeait mes cils et fouillait mes yeux douloureux. C'est alors que tout a vacillé. La mer a charrié un souffle épais et ardent. Il m'a semblé que le ciel s'ouvrait sur toute son étendue pour laisser pleuvoir du feu. Tout mon être s'est tendu et j'ai crispé ma main sur le revolver. La gâchette a cédé, j'ai touché le ventre poli de la crosse et c'est là, dans le bruit à la fois sec et assourdissant, que tout a commencé. J'ai secoué la sueur et le soleil. J'ai compris que j'avais détruit l'équilibre du jour, le silence exceptionnel d'une plage où j'avais été heureux. Alors, j'ai tiré encore quatre fois sur un corps inerte où les balles s'enfonçaient sans qu'il y parût. Et c'était comme quatre coups brefs que je frappais sur la porte du malheur. (A. CAMUS)